La gratuité est elle l’avenir de l’économie ?
Chris Anderson est un gourou sur Internet. Connu pour avoir inventé l’expression de la Long Tail, véritable révolution dans la manière d’aborder le commerce, il travaille actuellement sur son nouveau livre qui va à mon avis avoir un impact tout aussi important : la gratuité serait l’avenir de notre économie. Selon lui, la gratuité est inexorable : “La constante diminution des coûts de production de l’économie numérique incitera bientôt la plupart des entreprises à donner la majorité de leurs produits”.
Internet est bien évidemment le moteur de cette nouvelle théorie; au même titre que la Long Tail, il ne peut pas avoir d’économie de la gratuité sans les formidables innovations qu’apportent l’informatique dans notre société. Google est le meilleur exemple pour étayer cette idée, la société proposant un nombre de services gratuits incalculable, générant au passage des milliards de $. On peut également citer Ryanair qui propose des prix incroyables pour voyager en avion, son PDG souhaitant même proposer un jour des billets complètement gratuits ! Anderson évoque dans son article les 6 grands modes de financement de la gratuité :
- le modèle fremium : une version gratuite grand public couplée à une version payante, plus chère et plus évoluée pour un marché de niche, comme Flickr et les 25 dollars annuels de la version Pro. C’est le modèle de l’échantillon gratuit, si ce n’est que dans le numérique, une personne qui paye permet à des milliers d’autres d’avoir une version gratuite.
- le modèle publicitaire.
- les “subventions croisées”, c’est-à-dire l’offre gratuite d’un produit pour vous inciter à en acheter un autre, comme quand on vous donne un téléphone en échange d’un abonnement.
- le coût marginal nul : c’est-à-dire quand il est plus simple d’offrir que de faire payer, comme le constate sans doute le monde de la musique (en espérant bien sûr faire payer autre chose).
- l’échange de travail : vous accédez gratuitement à un service en échange d’un acte d’utilisation qui crée de la valeur (en améliorant le service ou en créant des informations qui peuvent être utiles ailleurs : c’est le principe des votes sur Digg, de Recaptcha…)
- l’économie du don : l’argent n’est pas la seule motivation. De Freecycle à Wikipédia, l’altruisme, l’économie du partage, montrent qu’il y a peut-être d’autres façons de créer de la valeur.
Il faut admettre que l’idée est séduisante, même si pour le moment elle se place plus dans le registre de l’intuition que de la démonstration scientifique. Pour le secteur de la musique, la gratuité s’impose de plus en plus, malgré les tentatives conservatrices des industries de protéger leur business model qui est désormais complètement dépassé. Plus un artiste est diffusé/écouté, plus son succès est grand ! A lui ensuite de “monétiser” sa popularité sur d’autres canaux que la vente basique de sa musique (et d’autres sources de revenues pour les artistes, on peut pas dire que ça manque)
Pour en savoir plus, je vous conseille de lire l’excellent article d’Internet Actu qui a inspiré ce billet, lui même issu de la revue Wired. Le livre de Chris Anderson, “Free”, sortira en 2009. Inutile de vous dire que je l’attends avec impatience…!
Je dois avouer que cette théorie fait beaucoup de sens selon moi. De plus en plus, les compagnies doivent donner des échantillons de toutes sortes afin d’attirer de nouveaux consomateurs. Ces derniers sont aussi plus avertis qu’avant.
C’est innévitable selon moi.
Modèle fremium > OK
Modèle publicitaire > OK
Subventions croisées > limitées dans leur application, mais OK
Coût marginal nul : OK à condition de ne pas seulement espérer vendre autre chose, mais d’avoir une stratégie bien verrouillée
Echange de travail : OK, mais là encore limité dans son application
Economie du don : attention danger
Si tu le permets Antonin, je vais réagir à cela sur mon blog (en citant bien sûr ton article), et expliquer mon point de vue, notamment sur le dernier point. Parce que le faire ici dans les commentaires, ça risque d’être long et rébarbatif.
[...] Billet en réaction à celui de mon pote Antonin de CodaBlog, titré : La gratuité est-elle l’avenir de l’économie ? [...]
@Jean : avec grand plaisir, merci pour ton billet ! Anderson va un peu loin avec son « Why $0 is the future of the business », mais je pense qu’il faut parfois savoir provoquer pour susciter des réactions et donc avancer dans la réflexion
En réalité, de nombreux services seront gratuits, mais il y en aura encore plus de payants, mais à mon avis à un prix vraiment bas par rapport à ce qu’on connait aujourd’hui.
Je pense notamment à la téléphonie mobile et je crois vraiment que d’ici quelques années on ne payera plus grand chose pour téléphoner, voir que cela sera gratuit, et quand nous repenserons aux prix des forfaits d’aujourd’hui on se dira qu’on payait vraiment très cher
Grâce à la téléphonie, une société comme Google va pouvoir collecter des data clients très précises (habitudes d’achats, géolocalisation…), le ciblage publicitaire sera donc au maximum et augmentera ainsi le potentiel de monétisation de ses activités, ce qui lui permettra de nous offrir encore plus de services de qualités toujours gratuitement (comme téléphoner)
Au final cela rejoint ce que tu disais, le modèle publicitaire est le moteur de cette nouvelle économie de la gratuité. Et ce n’est que le début !
Non seulement Google bénéficiera d’un vivier de contacts énorme mais as-tu entendu parler de Google Street View ? Je suppose que oui, ça vient tout juste d’être lancé dans les villes françaises c’est un truc de fou !!!!
Pour en revenir à ton article, je suis convaincue que le nouveau modèle économique reposera bientôt et exclusivement sur la gratuité… A titre d’exemple, les législateurs se battent pour interdire le téléchargement sur le net ; c’est à eux qu’il faut expliquer toute la dynamique !!
tres interessante discussion … un truc me gene un peu dans:
« Plus un artiste est diffusé/écouté, plus son succès est grand ! A lui ensuite de “monétiser” sa popularité sur d’autres canaux que la vente basique de sa musique (et d’autres sources de revenues pour les artistes, on peut pas dire que ça manque) »
les musiciens (par ex.) sont des gars simples: ils font de la musique et pour vivre
- soit c’est la ‘vente basique de disques’ comme tu dis MAIS donc a te suivre c’est = 0 maintenant, mauvaise pioche !
- soit les concerts/tournees, avec les limitations ‘physiques’ de cet exercice
a part ca, a quoi penses-tu pour les ‘sources de revenues pour les artistes, on peut pas dire que ca manque’ et ‘a eux de monetiser leur popularite’ … vendre des T-shirts … passer a la tele ?
pas sur qu’un Brassens aurait survecu …
@Julie : C’est clair qu’on a pas fini d’en parler de Google Menfin avec leur monopole sur la publicité, ils ont intérêt à nous proposer des services gratuits performants !
@riri06: Je n’ai pas assez explicité mon exemple sur la musique. Quand je parle de vente « basique » de musique, je fais référence aux cds vendus en magasin par exemple, pour un prix que je trouve toujours exorbitant.
Mais je ne « crache » pas sur l’artiste, je sais que derrière il faut un investissement très important pour sortir un album, et qu’au final il ne reste pas grand chose au musicien sur un cd vendu. Internet permet aux musiciens de s’affranchir des majors grâce à la vente de leur musique sur leur site par exemple. A eux d’en profiter et développer ce canal de vente « alternatif ».
Je reviens sur mon exemple de la musique en commentaire sur le blog de Jean : « je ne suis pas sur qu’il soit moins intéressant pour un artiste inconnu de mettre ses morceaux en libre téléchargement sur son site contre un don volontaire, ou un système avec l’achat de l’album en haute qualité face aux morceaux disponibles gratuitement en ligne en basse qualité, ainsi on pousse l’internaute à faire un “geste” pour un artiste qui sort du lot de part son approche différente de la diffusion de sa musique. Perso je suis sensible à ça, et je n’hésiterais pas à payer un album HQ que je peux télécharger en 3 clics, alors qu’habituellement j’aurais peut être plus tendance à aller directement voir sur du p2p. Après dans les faits je ne connais pas les résultats que pourraient donner ce type de stratégie… «
[...] augmente sa diffusion et donc sa “notoriété”, je l’évoquais notamment dans le billet La gratuité est elle l’avenir de l’économie ?. Je suis heureux de voir enfin officiellement une étude impartiale de ces faits. Je vous invite à [...]
[...] provoc] La gratuité est l’avenir de l’économie numérique, ceux qui ne l’ont pas compris vont droit dans le mur ! [/mode provoc] Tags : [...]
[...] Chris Anderson vient de publier son nouveau livre, Free : The Future of a Radical Price que j’évoquais dans un précédent billet : la gratuité est-elle l’avenir de l’économie ? [...]
Bonjour,
Je tiens moi même un blog qui s’intéresse aux problématiques de business model et je traite régulièrement de la gratuité.
Vous trouverez certainement des éléments qui vous intéresseront notamment sur le concept de marché multiface : http://site-communautaire.blogspot.com/2008/05/un-site-communautaire-un-march-multi.html ou http://site-communautaire.blogspot.com/2009/04/quand-reflechir-au-bm-de-son-service.html